Assemblée générale de l’ONU : la Russie recadre la diplomatie haïtienne et pointe du doigt les USA
« Il faut appeler un chat un chat et cesser d’appliquer une politique de deux poids, deux mesures », a retorqué le représentant de la diplomatie russe suite aux déclarations du chancelier haïtien à l’assemblée générale de l’ONU.
Publié le : 28 sept. 2022 à 08:09
« La situation est globalement sous contrôle », avait déclaré le ministre des affaires étrangères d’Haïti, Jean Victor Généus, lors de son passage à la tribune de l’assemblée générale de l’ONU. De son côté, la diplomatie russe ne l’entend pas de cette oreille et a tenu à présenter le véritable tableau caché par la chancellerie haïtienne.
En dépit de la situation chaotique qui sévit dans le pays et accentuée depuis plus de deux semaines par la suppression des subventions gouvernementales sur les produits pétroliers occasionnant une révision à la hausse des prix de l’essence, tout semble aller bien pour la diplomatie haïtienne.
Après que Jean Victor Généus ait si maladroitement tenté de cacher la véritable situation qui sévit actuellement et qui perdure depuis déjà plusieurs années en Haïti, la Russie a jugé bon de clarifier les choses. Sans langue de bois, le représentant russe a exprimé ses inquiétudes, rejeter d’un revers de main les propos de la chancellerie haïtienne et pointer du doigt, habilement, les États-Unis.
Une situation plutôt « à deux doigts de la catastrophe »
« Les nouvelles selon la situation à Port-au-Prince sont en train de se stabiliser nous inspirent de l’espoir. Néanmoins, tout porte à croire que le pays reste à deux doigts de la catastrophe », a ainsi lancé le discours du représentant de la fédération de Russie.
« Il y a là-bas une véritable guerre des gangs qui, pour la population civile, entraîne des enlèvements, des pillages, des violences et chacun a déjà l’habitude de craindre pour sa vie. Le résultat prévisible de cette situation, ce sont des manifestations provoquées par la décision du gouvernement de supprimer les subventions sur le carburant. Et, les désordres à grande échelle qui accompagnent ce phénomène les intimant à la démission des dirigeants du pays », at-il poursuivi.
« Nous entendons les déclarations selon que c’est la mafia, les oligarques qui se trouvent derrière ces manifestations ainsi que leurs parrains. Mais, les tentatives d’améliorer la situation et de faire baisser la satisfaction de la population sont clairement insuffisantes. Nous avons affaire à la frustration de la société qui a perdu confiance dans les autorités », martèle le chancelier russe.
« Nous n’avons cessé de dire qu’il était indispensable d’avoir un dialogue politique et de lancer un processus d’élections et de réformes. Malheureusement, nous ne voyons aucune action cohérente et ciblée visant le retour d’Haïti sur la voie constitutionnelle et celle du développement », a avancé le diplomate avant d’indexer les États-Unis.
Les Etats-Unis indexés
« Nous sommes particulièrement déçus par le fait que les acteurs extérieurs qui disposent des leviers du pouvoir à Port-au-Prince ne prennent pas de mesures visant à régler la crise dans le pays. En fait, ils ignorent ce qui se passe », at-il subtilement déclaré en référence aux États-Unis.
« Nous connaissons tous l’histoire d’Haïti et nous savons de quoi il s’agit. Les appels à se tenir aux côtés d’Haïti dans cette assemblée générale ne suffisent pas. Il faut faire des efforts pour que l’assassinat du Président Moïse, il y a 14 mois, soit enfin élucidé et les coupables doivent être punis », rappelle le chancelier.
Le diplomate russe a également rappelé qu’« on ne peut pas ignorer le fait que ça fait 6 ans qu’il n’y a pas eu d’élections dans le pays et que ça fait longtemps que les pouvoirs d’une grande partie du parlement ont expiré y compris dans le contexte de la signature, en 2001, de la charte démocratique interaméricaine ».
Le « deux poids, deux mesures »
« Mais des problèmes bien moins graves dans notre région suscitent les critiques et les menaces des membres du conseil. Je crois que vous devez être honnêtes et soit appeler un chat un chat, soit reconnaître que vous appliquez le deux poids, deux mesures concernant différents pays à l’ordre du jour du conseil », rappelle le diplomate russe.
« Madame la Présidente, la communauté internationale doit corriger ces erreurs, définir les véritables besoins des haïtiens et définir les moyens de les aider sans ingérences dans les affaires intérieures du pays qui, comme le montre l’histoire, ne mène pas au résultat souhaité », assure le chancelier.
Les bonnes solutions
Pour conclure, le représentant russe se dit prêt à examiner le projet d’instauration de sanctions ciblées contre les chefs de gangs. Il questionne néanmoins les retombés d’un tel procédé puisqu’il est tout aussi essentiel de s’assurer l’élimination de l’utilisation des comptes étrangers pour leur financement.
« Il convient d’accorder toute notre attention aux itinéraires du trafic d’armes et des flux financiers illicites. Tant que nous ne stopperons pas la contrebande d’armes, elle justifie à alimenter la spirale de la violence dans ce pays qui mérite depuis si longtemps la paix et le développement », at-il conclu.
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